Planète mer a pour objectif la préservation de la vie marine et des activités humaines qui lui sont liées. Son ambition est de donner à chacun les moyens d’agir en conscience sur son environnement.
La petite troupe d’observateurs s’est donné rendez-vous tôt sur cette plage bretonne déserte. Ils prennent les photos des algues brunes et des coquillages qui s’en nourrissent.
Plus tard, ils chargeront ces photos et les transmettront aux scientifiques du programme Biolit, un programme national de science participative.
A la fin de la saison d’observation, les données collectées par ces citoyens scientifiques sont analysées et utilisées pour évaluer l’impact des pressions naturelles et humaines sur l’organisation du vivant.
Les Sciences participatives se développent depuis des décennies. Aujourd’hui, les communautés de citoyens observateurs se forment sur des principes proches de ceux des réseaux sociaux pour intervenir dans le contexte des problèmes environnementaux .

Ce programme, qui permet à chaque promeneur de devenir acteur de la protection de la biodiversité, est initié par l’association Planète Mer, parmi d’autres actions dont l’objectif est de faire des citoyens les acteurs de leur environnement.
Un enfant de Cousteau
Laurent Debas, le fondateur de Planète Mer, est un enfant de Cousteau, comme beaucoup de jeunes gens de sa génération. Sa voie est tracée : il travaille pour des administrations, puis pour le WWF, une grande organisation mondiale de protection de la nature.
Sa vie prend un tournant lorsqu’il rencontre Jacques Perrin, qui monte un film sur les océans et recherche des spécialistes de la mer.
Laurent Debas est l’un des cinq réalisateurs qui ont travaillé sur le film Océans : « Le résultat, nous dit-il, est extraordinaire. Il a fallu que nous mettions au point de nouveaux engins de tournage. Il y a eu des avancées technologiques : des têtes géo-stabilisées pour courser les dauphins à pleine vitesse sans que l’image bouge, tourner en circuit fermé sous l’eau pour ne pas faire de bulles et ne pas effrayer les animaux. Avancées qui demandent des investissements de temps, de technologie et d’argent très importants : le film a coûté une fortune! »
Planète Mer
Pendant le tournage d’Océans, Laurent rencontre Mathieu Mauvernay, un passionné de mer, comme lui : de cette rencontre, est née Planète Mer.
Depuis l’adolescence, Laurent a le désir de « créer sa boite », mais ne trouve pas dans le secteur marchand le domaine dans lequel il pourrait le faire et choisit de s’orienter vers le secteur associatif. Il observe que les associations, notamment celles qui travaillent dans le secteur de l’environnement sont souvent militantes, bloquées sur des positions partisanes et dogmatiques et s’inscrivent dans la dénonciation et dans les rapports de force avec certaines catégories de professions liées à la mer, notamment les pêcheurs. Il souhaite prendre le contre-pied de cette attitude et créer une organisation ouverte au dialogue pour avancer vers des solutions qui conviennent à tous les intéressés.
Avec Mathieu, son associé, ils définissent l’objectif de leur association :
Préserver à la fois la vie marine et les activités humaines qui en dépendent. Ce qui nous intéresse, ce n’est pas simplement de protéger la vie marine, coûte que coûte, mais c’est aussi faire en sorte que l’humanité continue à se développer, exploiter les océans dans le respect des équilibres naturels.
En créant cette association, les deux amis avaient aussi l’ambition de créer leur emploi et d’en créer d’autres: comment monter un projet aussi ambitieux et aussi prenant sans être à plein temps et salarié ?
Des débuts difficiles
Les débuts d’une association, comme de toute entreprise sont souvent compliqués, d’autant que Planète Mer démarre juste avant la crise de 2008. Mais l’association décolle grâce au soutien de grandes fondations, ce qui permet aux associés de constituer une équipe.
Planète mer est primée deux fois en 2012, par la Fondation de France et par le Ministère de l’Environnement, justifiant a posteriori la confiance de ses donateurs.
Pour autant, et c’est aussi souvent le lot des associations dépendantes de subventions, rien n’est jamais vraiment gagné.
Les activités de Planète Mer
L’association couvre aujourd’hui un champ d’activités variées, en plus du programme Biolit, lancé en partenariat scientifique avec le Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) et de nombreux acteurs locaux, sur l’ensemble du littoral français:

Les activités de pêche
Pour Planète Mer, il est impossible de fonder un système durable pour la pêche sans assurer l’avenir des hommes et des femmes qui font vivre les communautés littorales. C’est pourquoi l’association donne la priorité aux projets de terrain qui permettent de démontrer que des solutions concrètes existent.
Sélectivité et pêche durable
Il s’agit de l’un des premiers programmes mis en place dans la région du Golfe de Gascogne avec les pêcheurs de langoustines. « La pêche se fait au chalut, nous explique Laurent Debas et n’est pas encore assez sélective même s’il y a eu de gros progrès. Les scientifiques de l’association travaillent avec les pêcheurs à la mise en place d’un dispositif de tables de tri et de goulottes de rejet, pour que tout les animaux qu’ils ne gardent pas puissent repartir le plus vite possible à la mer. Ce sont des petites améliorations intéressantes, qui inscrivent les pêcheurs dans une logique de progrès et de respect encore plus marqué de leur environnement. »
Marins chercheurs
Comme pour le programme Biolit avec les citoyens, le programme Marins chercheurs implique un partenariat avec les pêcheurs. Grands observateurs du milieu marin, ils sont cependant souvent exclus des décisions qui les concernent et en conflit avec les décideurs.
Le programme a vocation à recueillir leur savoir empirique pour le valoriser : avec ce programme, les pêcheurs sont impliqués dans leur métier et leur avenir.

Ce programme enthousiasme Laurent Debas : « Il s’agit de préparer la nouvelle génération de pêcheurs, à qui on n’apprend pas comment se régulent les équilibres. Nous avons la volonté de contribuer à ce que les choses évoluent dans un sens positif, pour que les pêcheurs puissent continuer à pêcher. C’est un enjeu absolument formidable! »
Planète Mer aujourd’hui
Aujourd’hui l’association compte cinq salariés de haut niveau et délègue à l’extérieur ce qui peut l’être, de la comptabilité à la communication, confiée à une agence locale.
L’image vis-à-vis des financeurs et des pouvoirs publics est bonne comme le précise Laurent : « Nous sommes perçus comme des professionnels, scientifiques et sérieux. Sinon ni la Fondation de France ni la Fondation Total n’auraient signé pour nous soutenir. Les Prix que nous avons reçus du Ministère et les Lauriers de la Fondation de France contribuent à notre bonne image. En revanche, nous avons une très faible notoriété auprès des citoyens : nous avons encore un gros travail à faire. »
Passerelles & Compétences : des ressources précieuses
Les responsables de Planète Mer connaissaient l’existence de Passerelles & Compétences, mais n’y avaient jamais eu recours. Ils y pensent après des passages difficiles et souhaitent se faire accompagner par des bénévoles de haut niveau dans certaines missions particulières, pour lesquelles ils ne disposent ni des compétences en interne, ni du budget nécessaire.
La première concerne la stratégie de levée de fonds; Laurent et ses associés avaient besoin qu’un expert les éclaire sur les possibilités de trouver de nouvelles sources de financement, identifie de nouveaux partenaires pour renforcer le développement de l’association et préconise des pistes de communication.
Annick M., de l’antenne de Marseille met Laurent en relation avec Céline B., qui vient du milieu de l’entreprise et souhaite désormais orienter autrement sa vie. Elle y mène sa mission et, très séduite par les activités et les objectifs de l’association, elle finit par rejoindre l’équipe où elle est désormais salariée, chargée de la recherche de fonds.
Les dirigeants de l’association rencontrent ensuite Martine S., maître de conférences à l’Université de Marseille, spécialisée dans les questions informatiques : « Nous avons trois sites internet, explique Laurent, ce qui nous pose des problèmes d’organisation et de compétence. Nous avions des besoins de conseil en stratégie pour ne pas nous disperser et nous devions structurer notre base de données. Martine nous aide sur la partie informatique avec une générosité magnifique.
C’est extraordinaire de rencontrer des bénévoles aussi engagés et compétents, qui s’intéressent à nos activités.»
Optimisme
Grâce à ces accompagnements bénévoles, Planète Mer a pu améliorer ses outils et rencontrer puis embaucher leur responsable de la recherche de fonds.
Laurent Debas est optimiste, malgré les difficultés du contexte actuel et la course à l’urgence dans laquelle sont si souvent emportés les dirigeants d’associations. Il sait qu’il sera nécessaire à l’équipe d’être encore plus créative à l’avenir.
Avec le recul, il est toujours aussi heureux d’avoir monté cette association et de continuer, avec ses associés, à s’y épanouir.