Avec les marins

L’association Nantes Port Accueil perpétue une longue tradition d’accueil, d’écoute et de service auprès des marins des marines marchandes du monde qui font escale à Nantes.

L’escale peut être un moyen pour certains de ces marins de sortir de cet isolement pour joindre leurs familles par téléphone ou par e-mail ou par une conversation avec quelqu’un extérieur au bord.
C’est un moyen de rompre cet isolement que propose l’association.

On ne croise pas souvent de marins dans les villes portuaires.

Les ports sauf exception sont loin des centres des villes, et il n’est pas si facile pour les marins de s’y rendre pour faire leurs courses, respirer un air différent, visiter.

Si les marins ne sont pas dans l’extrême pauvreté, ils sont parfois dans la solitude. Ils choisissent d’être expatriés pour avoir une meilleur vie chez eux, embarquent pour de longues périodes en changeant de port

Ils n’ont pas accès à internet dans les bateaux pour communiquer avec leurs familles.

Selon une convention internationale, la convention de l’OIT sur les conditions de travail des marins, les gouvernements prennent en charge les marins dans les ports pour leur donner des moyens de communication, des informations, des possibilités de liens sociaux. C’est ainsi qu’il existe des foyers , les « sea mens’club » dans les ports.

Le centre d’accueil du port de Nantes a été fondé en 2003 par un religieux, Yves Aubron, un homme qui appartenait au monde maritime et a beaucoup œuvré pour les femmes de marins et les marins pêcheurs. Il appartenait à la mission de la mer où il était aumônier, un mouvement d’église qui accompagne le monde maritime.

Se reconnecter

Bernard Lefèvre, l’actuel président de l’association est lui-même ancien officier radio de la marine marchande. Il a navigué une dizaine d’années, puis est entré dans l’administration maritime pour s’occuper de la sécurité des navires. Il a repris le flambeau de la responsabilité de l’association après sa retraite.

Nantes Port Accueil peut compter sur une vingtaine de bénévoles travaillant par équipes pour être présents tous les jours auprès des marins.

L’association est financée  par le port qui prend en charge une part des frais d’escale et par les armateurs qui contribuent à leur bonne volonté au bien-être pour les marins dans les ports.

Au quotidien, l’association aide les marins en les accueillant dans un très modeste foyer relativement proche des quais (l’espace est partagé avec une autre association).

Bernard Lefèvre détaille les actions menées par les bénévoles : « Nous avons acheté un minibus pour les conduire en ville afin qu’ils puissent faire leurs courses, changer ou transférer de l’argent, aller dans un lieu de culte, faire autre chose, voir autre chose, se reconnecter avec l’environnement terrien.

Au foyer, ils peuvent accéder à Skype pour parler à leur famille, lire des journaux dans leur langue. Nous avons à Nantes trente nationalités différentes qui débarquent et nous essayons de trouver des bénévoles qui parlent ces langues, le russe, l’arabe, l’espagnol, et qui ont également le sens de l’ouverture à l’autre et le goût du voyage. Pour nous, la discussion avec eux c’est un grand voyage immobile.

En dehors de l’accueil au foyer, nous rendons des visites à bord. Ils apprécient d’être en contact avec des gens pour autre chose que pour le travail. Dans leur maigre créneau de temps, on s’inquiète d’eux, on leur donne des informations sur le port et sur la ville, on leur donne les clés pour qu’ils puissent sortir et voir un peu de notre pays. Nous sommes conscients que nous représentons notre pays auprès d’eux.»

Un rôle de médiateurs

L’association assume également un rôle important pour faciliter les relations des marins avec l’administration en cas de difficultés ou de réclamations, par exemple dans certains cas – heureusement peu fréquents - où l’armateur ne paie pas les salaires.

Il arrive en effet que les équipages soient abandonnés sur le bateau dont ils ne veulent pas débarquer, de crainte de perdre définitivement leurs salaires.

Autour d’eux tout se ferme. Les agents qui représentaient l’armateur disparaissent et les marins se retrouvent sur le navire, sans soutien, sans soin, sans nourriture ni carburant pour faire fonctionner les groupes  électrogènes : les problèmes sont alors de nature humanitaire.

Ces situations très graves surviennent régulièrement et si, dans le passé, il y avait des signes avant-coureurs comme un bateau en mauvais état, ce n’est plus le cas aujourd’hui où tout navire peut avoir des problèmes financiers. L’armateur en difficulté voit son navire saisi et l’équipage se retrouve abandonné.

Dans ce type de situation, les marins ne se rapprochent ni des syndicats ni de l’administration portuaire. D’abord parce qu’il leur est compliqué de cheminer dans les arcanes de l’administration mais aussi parce qu’un marin qui porte réclamation risque de se voir ostracisé par les armateurs et de ne pas trouver de nouveaux contrats.

Ils font alors confiance aux bénévoles de Nantes Port Accueil, connus pour leur discrétion, pour faire remonter les problèmes aux autorités ou aux syndicats qui cherchent alors les solutions.

Des conditions difficiles

Pour l’instant, l’association ne dispose que d’un local en partage pour accueillir les marins :les bénévoles ne peuvent pas y laisser leur matériel et l’accès n’est pas disponible en permanence, ce que déplore le président : « Nous nous devons de les accueillir décemment, aussi bien que dans d’autres seamen’s club d’Europe car les marins comparent. »

Le projet de construire un nouveau foyer qui puisse répondre aux attentes des marins comme des bénévoles est en cours, il avance, aidé par les autorités portuaires et les armateurs et devrait être inauguré en 2017.

Bernard Lefèvre souligne que le monde maritime français s’est appauvri il y a de cela une quarantaine d’années. Il reste très peu de marins français, les ports se sont éloignés des centres des villes, et, souligne t-il : « Les gens sont toujours étonnés de savoir qu’il existe encore une marine marchande à Nantes 4000 avec marins étrangers par an ! »

Dans ces conditions, il n’est pas facile de motiver et de fidéliser des bénévoles, d’autant plus que ces derniers doivent connaître la dimension géopolitique et posséder une culture de la nationalité et de l’histoire de ces marins, tant il est vrai qu’on n’ aborde pas de la même manière un Russe ou un Philippin : « On ne peut pas faire de l’accueil sans savoir tout cela, précise Bernard. On doit tenir compte du fait qu’il y a beaucoup de marins russes bien formés qui travaillaient pour la flotte soviétique.

Chaque pays a ses codes. On ne doit pas être inquisiteurs ni donneurs de leçons et ce n’est pas toujours inné ! »

La plus-value de Passerelles & Compétences

Bernard rencontre des bénévoles de P&C dans un forum et découvre les apports sur lesquels il va pouvoir compter : «  A une certaine époque, se souvient-il, nous avions un véritable besoin de formation pour renforcer nos savoirs faire dans un certain nombre de domaines.

Nous avons fait une première mission finances/comptabilité. Nous envisagions d’augmenter nos financements et il fallait que nous soyons totalement clairs vis à vis des bailleurs de fonds pour montrer notre sérieux.

Nous avons rencontré JP.H., un bénévole expérimenté et sérieux, technicien de la comptabilité , très disponible et à notre écoute. On a progressé grâce à des rendez-vous réguliers qui ont bien duré une année. Et se prolongent puisque le bénévole a été disponible par la suite lorsque nous avions besoin de précisions. »

En 2016, Nantes Port accueil se lance dans la construction du foyer et a besoin de se faire accompagner dans la maîtrise d’ouvrage. Deux bénévoles travaillant en binôme dont l’un plus disponible est en préretraite, accompagnent l’association pendant plusieurs mois, ce qui leur permet une plus grande souplesse et une meilleure réactivité, à la grande satisfaction de tous : « Nous n’aurions jamais réussi à nous en sortir sans ces personnes qui sont de la partie ajoute Bernard. Nous avons des contacts chaque semaine pour réfléchir. C’est très intense, ils sont intégrés à notre association et sont partie prenante de notre cause. Leur esprit est presque celui de notre association. Ils réfléchissent avec nous de manière très impliquée.

L’un Patrice T. était conducteur de travaux, l’autre, Olivier R., en activité, s’occupe de la maîtrise d’œuvre et de la gestion du patrimoine de la ville de Nantes Métropole. Ce sont des experts de qualité qui nous aident à progresser ».

Les associations ont besoin de devenir plus professionnelles ; Bernard estime qu’on ne peut pas faire l’impasse sur la plus value de Passerelles & Compétences.

Bernard Lefebvre

Bernard Lefebvre

Président

Nantes Port accueil